L’interview d’Alma (France 2017)

Bonjour Alma.
Peux-tu te présenter, nous dire qui tu es, où tu as grandi et quand tu as commencé à chanter ?
Je m’appelle Alma, j’ai 28 ans et j’ai grandi entre la France et les Etats-Unis. Ensuite j’ai voyagé au Brésil pour mes études, pendant un an à Sao Polo, puis j’ai travaillé un an à Milan, et ensuite un an à Bruxelles, et je suis revenue vivre à Paris il y a quatre ans pour me lancer dans la musique.
J’ai commencé à chanter jeune, car depuis toute petite j’aime ça, mais je ne me disais pas que j’en ferais mon métier. D’ailleurs ma famille n’est pas du tout dans la musique. Donc je ne savais pas trop comment accéder à ce métier. Et finalement j’ai tout lâché il y a bientôt cinq ans et je me suis inscrite dans une école de chant dans un cursus d’auteur-compositeur, à Paris. Et à partir de là je me suis dit : « On y va ! ». J’ai rencontré des gens qui m’ont ouvert des portes, et qui m’ont amenée là où je suis aujourd’hui.
Tu faisais quel type d’études ?
Des études de commerce.
Quelles sont tes influences musicales et comment définirais-tu le style et l’univers d’Alma ?
J’ai beaucoup d’influences musicales, mais ce qui m’inspire quand j’écris c’est ce qui se passe dans ma vie, et les moments que je vis. Après j’aime beaucoup la variété française. J’aime beaucoup Michel Berger, Véronique Sanson, France Gall, par exemple. Et grâce à mes voyages et à mes rencontres j’essaye de mélanger la variété française avec des influences un peu plus pop des Etats-Unis, ou un peu orientales grâce à ma rencontre avec Nazim. C’est très intéressant de mélanger les genres. C’est de quoi les gens se nourrissent finalement.
Tu chantes seulement en français, ou en anglais, ou dans d’autres langues ?
Pour l’instant je ne chante qu’en français, mais j’ai commencé la chanson en écrivant des chansons en anglais.
A l’ère de l’internet dominant, de youtube et des réseaux sociaux, comment une jeune chanteuse peut arriver à percer ?
Evidemment il faut avoir l’envie, le talent et la détermination. C’est un travail de longue haleine pour arriver à se faire connaître. Mais c’est aussi un peu aléatoire. Et il faut arriver à durer. On peut faire un buzz sur internet. C’est super, il y a 1 million de vues. Et puis il ne se passe pas grand-chose de plus après. Mais je crois qu’il faut voir aussi internet comme un outil. Ça permet de rencontrer les gens, de leur parler, d’échanger. On te donne des idées. On te fait des suggestions.  Ça crée un mini mais aussi un vrai public. Et ça peut être un très bon moyen de se lancer dans la chanson. Au final il n’y a pas de chemin tout tracé dans ce métier.
Quelles sont les rencontres qui ont été importantes pour toi dans ton parcours et qui t’ont fait évoluer?
La première rencontre qui est très importante est celle d’Edoardo Grassi. Il y a deux ou trois ans il m’a contacté pour faire une émission de télé qui s’appelait « Les chansons d’abord ». C’est grâce à ça que j’ai rencontré Nazim sur ce plateau de télé, et avec qui j’ai fait tout l’album et qui a écrit la chanson « Requiem ». Ensuite c’est lui qui m’a ouvert les portes de ce milieu. Il m’a amené chez Warner où j’ai rencontré Benjamin Marciano et j’ai fait mon contrat avec eux. Ce sont les deux personnes qui m’ont mis le pied à l’étrier.
Le premier album est annoncé. Il sortira quand ? Avec qui as-tu collaboré sur cet album ?
L’album doit sortir le 5 mai. J’ai collaboré avec Nazim sur presque toutes les chansons mais j’ai aussi collaboré avec un monsieur qui s’appelle David Gategno (NDLR : alias David Marouani, connu pour être l’un des deux membres du duo David & Jonathan, qui a eu beaucoup de succès dans la seconde moitié des années 80) qui a écrit une superbe chanson « Après l’aurore ». J’ai collaboré aussi avec Pierre Jaconelli qui a écrit pour Johnny Hallyday (NDLR : C’est un guitariste, compositeur, réalisateur et producteur musical français qui a travaillé avec tous les grands noms de la chanson française dont Patricia Kaas), avec Renaud Rebillaud qui a travaillé avec Maître Gims (NDLR : Renaud Rebillaud a co-écrit pratiquement tous les titres des deux albums de Maître Gims). Il y a vraiment un melting pot de gens qui ont su m’entourer et qui ont su comprendre mon univers. Du coup ça donne un album très varié et chaque chanson est un mini-univers au sein d’un univers plus grand.
Quel est ton rapport à la scène et au live ?
J’adore ça. C’est un moment magique. Les premières parties d’Amir ont été une découverte pour moi parce que les scènes que j’avais faites avant étaient des petites scènes et parfois même des bars où tout n’était pas très bien organisé. Et là d’avoir des techniciens, pour le son, pour la réverb, ou pour les lumières, c’est un luxe pas possible. Et j’ai découvert le plaisir de chanter pour beaucoup de gens, c’était et c’est toujours vraiment bien.
Parlons de « Requiem ». Le single est sorti le 13 janvier 2016 aux éditions Bukowski Publishing. Il a été écrit et composé par Nazim Khaled et mixé par We Are I.V. Le clip vidéo est en ligne depuis le 9 février.
Quand as-tu su que tu allais représenter la France à l’Eurovision avec ce titre ?
Je l’ai su début décembre quand France Télévision m’a appelé pour m’annoncer la bonne nouvelle.
Il a été écrit par Nazim Khaled qui a aussi écrit « J’ai cherché ». Comment s’est passée ta rencontre avec Nazim et comment avez-vous travaillé ensemble sur ce titre ? Continuez-vous à collaborer ?
Ma rencontre avec Nazim c’était il y a trois ans. Je n’ai pas participé à l’écriture du titre. C’est Nazim qui l’a écrit. Je me souviens, il m’avait envoyé un texto pour me dire « J’écris une chanson pour toi. J’hésite même à la garder pour moi, tellement je l’aime ». Le lendemain on s’est vu. Il m’a fait la chanson en guitare-voix, et j’ai trouvé ça magnifique et évidemment je la lui ai prise car je la voulais. Et ensuite on a travaillé avec les Skydancers. On a fini la chanson y’a un an je pense.
Quel est le message ou l’histoire que porte « Requiem » ?
Pour moi c’est une ode à la vie. On est tous mortel et la vie passe vite, alors il faut profiter de chaque seconde, chaque instant. Tout va très vite et il y a trop de noirceur dans le monde, alors il faut qu’on trouve de la force en soi. Et moi ce que j’ai trouvé pour ne pas se laisser envahir par ça, c’est l’amour. Il faut aimer les gens, sa famille, et vivre des histoires d’amour.
L’accueil en France et surtout en Europe est bon voire très bon. La musicalité plait beaucoup notamment le côté un peu oriental de l’instrumental et le fait que ce titre soit dansant. Qu’est-ce que ça t’inspire ?
Je suis vraiment très touchée. Je ne m’attendais vraiment pas à ça. J’ai commencé à recevoir des messages de gens de Russie, d’Espagne, d’Italie, et même du Brésil ou de Colombie. C’est hallucinant la mobilisation qu’il y a derrière le clip et la chanson. Ça me rend vraiment très heureuse et ça me conforte dans la détermination que j’ai d’aller faire cette compétition avec cette chanson. Ça me donne des ailes.
Le titre devrait être retravaillé et remixé pour le concours. Quelles sont les modifications qui vont y être apportées par rapport à la version single qu’on entend actuellement en radio ?
On est en train de travailler sur la production, sur la réalisation du titre. Ça veut dire que ça ne sera pas complètement différent. Le titre devrait être un peu plus épique, plus Eurovision, disons plus grandiose. Et on pense à mettre une partie du refrain en anglais afin de toucher le plus grand nombre de spectateurs, afin qu’ils comprennent et qu’ils puissent identifier la chanson.
L’Eurovision c’est une aventure de trois mois non-stop avec beaucoup de pression médiatique, des interviews, des photos, des vidéos mais aussi beaucoup de contacts (autographes selfies et photos) avec le public, les eurofans et les supporters de la France, comment est-ce que tu te prépares à ce tourbillon médiatique ?
Comme ça ! J’apprends sur le vif. C’est vrai je n’ai pas beaucoup d’expérience encore, mais ça fait à peine dix jours que l’annonce a été faite. Je commence les interviews. Les gens commencent à me demander des petites photos. Il faut s’habituer et puis c’est un plaisir, un partage de petits moments qui sont très agréables. C’est aussi pour ça qu’on fait ce métier. C’est pour rencontrer les gens. On chante une chanson, on a trois minutes pour faire passer un message et les gens te jugent là-dessus et se font une idée de toi comme ça. Moi j’aime bien aussi expliquer le pourquoi du titre, de quoi ça parle. C’est intéressant de pouvoir communiquer avec les gens autour de ta chanson.
Il y a une grosse promo en France. Iras-tu aussi faire de la promotion à l’étranger ?
On va aller à Londres (London Eurovision party, le 2 avril) et à Amsterdam (Eurovision in Concert, le 8 avril).
Le 6 mai prochain tu fouleras la scène pour la première fois. Ce sera la première répétition. C’est toujours un moment très fort pour les artistes que ce premier contact avec la scène. A quoi penseras-tu lorsque tu y feras tes premiers pas ?
Je ne penserai sans doute pas à grand-chose si ce n’est de vivre ce moment-là.
La prestation est un package où chaque détail compte. Les costumes, la mise en scène, le visuel, la chorégraphie, le jeu des chanteurs et des éventuels danseurs ou choristes. Peux-tu nous donner quelques infos sur ce que toi et ton équipe envisagez de faire ?
Malheureusement je n’ai pas beaucoup d’informations à vous donner parce qu’on étudie actuellement tous les cas de figure pour être vraiment à fond le jour J afin que rien ne soit laissé au hasard. On essaye un peu de voir comment mettre tout ça ensemble et faire un très beau tableau, le plus beau tableau possible qu’on puisse imaginer pour représenter la France dans ce concours.
Amir a réalisé un parcours fantastique l’an passé, nous apportant une magnifique 6ème place, meilleur résultat depuis 2002. Qu’est-ce que toi tu vises comme résultat au concours ?
Quand on s’engage dans un concours c’est pour viser la plus haute place. Mais ce n’est pas moi qui vote. Je ne veux pas paraître prétentieuse mais on va tout faire pour être classé le mieux possible.
Est-ce que Amir t’as conseillé et donné de petits trucs ?
Les conseils qu’il m’a donné au début c’est de profiter de chaque instant qu’apporte cette aventure parce que c’est unique. Cette aventure est d’une incroyable envergure internationale. Les gens ont une passion pour l’Eurovision, partout, et c’est magnifique de faire partie de cette famille. Il m’a dit aussi de débrancher les réseaux sociaux pour ne pas voir ce qui s’y passe. Ce sont de très bons conseils que j’essaye de suivre.
Quelle image as-tu de l’Eurovision ? Regardes-tu le concours ? As-tu des souvenirs particuliers de soirées Eurovision ?
Mon meilleur souvenir c’est l’année dernière. J’étais avec mes deux meilleures amies, à Enghien-les-Bains. On était devant notre télé et quand Amir est passé on était toutes les trois debout à scruter l’écran et à profiter de la moindre seconde de sa prestation. J’ai aussi vécu des Eurovisions, c’était en Belgique, et dans les rues les gens étaient déguisés et je trouve ça super. C’est comme une coupe du monde. C’est dommage qu’en France on ne le vive pas comme ça. En France on n’était pas toujours au courant que ça se passait. Je suis contente qu’Amir ait complètement changé la donne et j’espère réunir le plus de monde possible derrière ça, pour que l’Eurovision devienne un évènement national comme dans les autres pays d’Europe.
Est-ce qu’il y a des chansons ou des artistes du concours qui t’ont marqués ? Lesquels ?
Marie Myriam, il y a quarante ans maintenant.  Céline Dion. C’était en 88 je crois, mon année de naissance et c’est une de mes idoles. Il y a eu France Gall aussi.
Et Conchita Wurst tu l’as suivie ?
Bien sûr. C’était très beau ce qui s’est passé.
As-tu déjà écouté des chansons de concurrents de cette année ? Est-ce que tu comptes le faire ?
Oui je compte le faire. J’ai déjà entendu la chanson de l’Italie, mais aussi celle de la Finlande, « Blackbird », qui est très belle d’ailleurs. Je remarque qu’il y a déjà pas mal de ballades. Donc je suis très heureuse de ne pas arriver avec une ballade parce que c’est difficile de se démarquer quand on a le même style de chanson. Je trouve en tout cas que les chansons sont modernes.
Quel est ton principal atout pour la compétition et ta petite faiblesse ?
Mon principal atout c’est ma détermination à suivre les pas d’Amir. J’ai vraiment envie que ça soit comme l’année dernière, mais encore mieux préparé et avec encore plus d’effervescence pour ce projet. Il y a une vraie dynamique et, à nous tous, on peut réussir à faire comme Amir l’année dernière. Un bon résultat.
Ma petite faiblesse, je pense que ça pourrait être le stress du live, parce qu’Amir avait quand même une expérience avec « The Voice » que moi je n’ai pas. Mais je me prépare avec beaucoup de professionnels et je vais faire aussi beaucoup de promotion. Je préparerai ainsi ce live du mieux que je peux pour être prête le jour J.
Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter ?
La chance. La force de faire tout ça le mieux possible. Et la plus belle place qu’on puisse rêver.

Interview réalisée par Farouk Vallette, le 16 février 2016.
Nous tenons à remercier chaleureusement Alma et Ludovic Hurel, pour ce moment de convivialité.

Image à la une : Alma,©Farouk.Vallette

L’interview d’Amir (France 2016)

Bonjour Amir. Peux-tu nous parler de ton parcours personnel et musical ?

J’ai passé ma petite jeunesse à Paris, à Sarcelles pour être plus précis. A l’âge de huit ans on a déménagé à Tel-Aviv, en Israël, avec ma famille. Mon père a continué, lui, à travailler en France et il faisait des allers-retours pour venir nous voir. Nous vivions à Tel Aviv, mais avec beaucoup de voyages en France pour voir la famille. On entretenait ainsi une forte relation binationale tout au long de ces années.

A l’âge de 22 ans, avant de commencer des études de chirurgie dentaire, je me suis retrouvé avec une petite période assez libre que j’ai décidé d’exploiter pour tenter ma chance dans la musique. C’était une bonne manière de passer le temps et je me suis inscrit au casting de la « Nouvelle star » en Israël. Ça s’est très bien passé, surtout par rapport à mon niveau de l’époque car j’étais amateur. Et de manière assez surprenante je me retrouve en live, avec les derniers candidats au concours, une dizaine de candidats. C’est l’émission la plus regardée et je chante sur scène. Je n’ai pas fait long feu car ils étaient plus doués que moi, et j’étais à peine chanteur. C’était une belle expérience à vivre et surtout ça m’a ouvert l’esprit face à quelque chose que je ne connaissais pas et que je n’avais jamais imaginé faire dans ma vie. Mais je suis engagé sur des études, je continue mon parcours scolaire et je vais à la fac. J’ai fait six ans d’études, mais au fur et à mesure des années je me sens de plus en plus intéressé par la musique. Je prends des cours de chant, je fais des chansons, je fais des petits concerts, tout en étant étudiant en chirurgie dentaire. Vers la fin de mon parcours scolaire j’annonce à mon entourage que je vais faire une trêve avant d’ouvrir mon cabinet, pour mon âme, pour ma sensation personnelle, pour répondre à mes besoins. J’avais besoin, spirituellement peut-être, de faire de la musique. Et tout le monde l’a accepté.

J’ai donc fait de la musique pendant un an en postant des vidéos par internet, j’écrivais des chansons, je continuais les cours de chant. Et puis je suis contacté pour faire « The Voice » en France. Et on peut dire que ma vie a redémarré à ce moment-là. Parce qu’au départ, bien sûr, je me suis questionné en me disant « Tu as déjà fait une émission, pourquoi en faire une autre ? ». J’ai discuté avec mon entourage qui m’a beaucoup encouragé à le faire, parce que je ne connaissais pas l’impact qu’avait « The Voice » en France. Je connaissais ce qui se passait en Israël et ça n’était pas très positif. Il n’y avait pas beaucoup d’audimat, mais beaucoup de dérision envers les artistes et ça leur faisait terminer leur carrière plutôt que de la démarrer. J’ai écouté mes amis Français et j’ai tenté ma chance.

En effet dans l’émission diffusée le 18 janvier 2014, aux auditions à l’aveugle où tu interprètes « Candle in the wind », les quatre jurés se retournent et tu choisis d’intégrer l’équipe de Jenifer. Pourquoi ?

Parce qu’elle m’a convaincu tout simplement. Je les ai écoutés. Je ne les connaissais pas assez bien pour me faire un avis. Et je n’avais pas prévu à l’avance qui je choisirais, donc j’étais complètement neutre. Une fois que les quatre se retournent, on a vraiment la possibilité de faire son choix. J’ai bien écouté chacun d’entre eux et elle me paraissait la plus déterminée à me vouloir et grâce à elle je suis arrivé en finale.

Comment s’est passée ton aventure sur « The Voice, la plus belle voix » ?

Ça s’est hyper bien passé, car depuis « The Voice » ma vie est une aventure musicale qui ne s’est pas arrêtée. J’ai terminé l’émission en finale, ce qui était merveilleux de voir que le public me soutenait. Une fois le concours terminé, nous avons fait notre tournée dans toute la France, et puis j’étais libre ensuite de décider si je voulais retourner en Israël pour arrêter la musique ou si je voulais continuer l’aventure ici en France. Mais maintenant, il n’y a plus « The Voice » et il faut le faire de nos propres mains. J’ai donc tenté ma chance en espérant que ça fonctionne.

J’ai commencé à parler avec des gens, à faire des rencontres, à rentrer en studio, et les choses se sont bâties peu à peu. Et au bout d’un an, un an et demi même, de travail, on se retrouve avec un projet qui tient la route. Et avec toute l’équipe qui s’est formée autour du projet, toute cette famille, il y a une énorme motivation, une énorme envie d’en faire quelque chose de beau et quelque chose de grand, on s’est senti enfin prêt et fier de cet album qui a été écrit. On est allé voir la maison de disques et depuis les choses se sont enchaînées.

Qui sont les membres de cette équipe ?

C’est difficile à dire parce que je ne sais pas où m’arrêter. Mais l’entourage le plus proche contient mon manager, Arié Sion, qui lui croit en moi depuis l’époque où j’étais étudiant. Il m’a même encouragé à finir mon parcours scolaire avant d’essayer quelque chose dans la musique. C’était lui qui me disais « Tiens, il y a un petit concert ici, va le faire pour prendre un petit peu d’expérience » ou encore « Tiens, je t’ai branché sur un autre plan ». Il croyait en moi, en parallèle de ses autres activités car à l’époque il n’était pas entièrement dédié à la musique. Mais il était là pour moi et il croyait en moi. Après il y a une autre personne, David Boukhobza, mon producteur, qui a rejoint le projet, et qui a investi ce qu’il faut en temps et en argent pour lui faire prendre des formes et du point de vue artistique je citerai aussi Nazim Khaled et Silvio Lisbonne, qui ont été auteurs-compositeurs avec moi sur l’album, sur une grande partie des chansons, qui m’ont aussi présenté beaucoup de gens et qui m’ont permis de comprendre comment les choses fonctionnaient dans ce métier, parce qu’ils sont dedans depuis un moment. Et le travail avec eux est un bonheur. C’est ce que je considère comme la petite famille, après il y a les amis qui ont construit le site, ceux qui s’occupent des réseaux sociaux, ceux qui s’occupent de la coiffure, des costumes, tellement, tellement de choses…

La chanson a été choisie en décembre. Comment est-ce que tu te retrouves à l’Eurovision ? Comment la chanson a-t-elle été choisie ? Comment cela a-t-il été finalisé ?

C’est parti d’un rendez-vous complètement anodin, avec Nazim, et un de ses amis Edoardo Grassi. Edoardo, que l’on me présente sans aucune perspective eurovisionesque quelconque, me dit « Je suis devenu le nouveau chef de la délégation française ». Moi, qui aime beaucoup ce concours, je m’intéresse à son parcours et à ce qu’il envisage de faire cette année. Et il me dit « On cherche encore la chanson ». Moi je lui parle de mon projet et je lui dis « Voilà l’album, les chansons on les a écrites avec Nazim, on est super fier, voilà le titre sensé sortir comme premier single, je te le fais écouter ». Il écoute et c’est là qu’il me dit « Amir, je pense que tu devrais faire l’Eurovision avec cette chanson ». Ma première réaction c’est « Tu vas trop vite ! J’ai mon projet musical, j’ai envie de le faire vivre, j’ai travaillé très dur là-dessus, si maintenant je l’offre pour l’Eurovision, où est-ce que j’existe dans tout ça ? Est-ce que les gens vont comprendre que c’est ma chanson. Et vont-ils comprendre que je ne l’ai pas écrite pour le concours ? ». On se posait donc beaucoup de questions. Malgré tout, ça m’a trotté dans la tête. Et puis il y avait la responsabilité de représenter la France. Qui suis-je ? Pourquoi est-ce que je mériterais de faire ça ? Est-ce que j’en suis capable ? J’ai réfléchi. On en a parlé avec mon entourage professionnel. Et une fois qu’on s’est tous décidé à dire oui, je suis revenu voir Edoardo et je lui ai dit « Faisons-le. Mais, par contre, je ne veux qu’une seule chose, pour moi. C’est que tu permettes à ma chanson de sortir quand elle était prévue de sortir, sans raconter à qui que ce soit que ça sera le titre de l’Eurovision. On la laisse vivre et on voit comment les radios l’accueillent ». J’ai vraiment besoin de ce regard neutre, de cette appréciation du public et du métier. Je veux savoir ce que les gens en pensent. Et les radios l’ont accueilli avec une chaleur énorme, aucun rapport avec l’Eurovision, en le faisant diffuser entre 300 et 500 fois par semaine, dans toutes les radios de France. Il est sorti en janvier. Puis, quand on a compris que ce titre avait de la valeur, ce qui était très important pour nous, pour moi, dans mon cheminement artistique, qu’on était sur la bonne voie, on s’est dit « C’est bon, on peut l’annoncer ». Et une fois que ça a été annoncé, ça n’a fait qu’embellir les choses. C’est aussi beaucoup plus concret. On a un but. On a un objectif. On veut y arriver. Mais au moins, on sait que cette chanson fait partie d’un tout, d’un projet, et d’un album.

Ça n’a pas été trop dur de garder le silence pendant de longues semaines et de ne rien lâcher ?

Oui c’était très difficile. Mon entourage proche n’était pas au courant. Vous imaginez. Quand on a une nouvelle qui peut les rendre aussi fiers, aussi heureux. Donc on la garde à l’intérieur. Et très souvent ils te disent « Ben alors Amir, qu’est-ce qui se passe ? Quelles sont les prochaines étapes ? ». Et tu ne peux rien leur dire. Il y a un truc énorme qui s’annonce, mais c’est un secret et tu dois garder le silence.

Comment as-tu réagi quand Cyril Hanouna a balancé la nouvelle que ce serait toi qui représenterait la France cette année ?

La première réaction c’est une forme de tristesse, parce qu’on a fait tellement d’efforts pour cacher la chose. Moi-même je me rappelle combien je briefais les personnes qu’on avait fait entrer dans la confidence. Je mettais la main sur le cœur en expliquant qu’il y a beaucoup de choses dépendantes de ce secret et qu’on doit essayer de garder un impact important pour le titre. J’avais l’impression que tout le monde jouait le jeu et je ne sais pas du tout comment ça a fuité. Ma première réaction c’était d’être déçu. J’ai mis ensuite peu de temps à me ressaisir et à me dire qu’il n’y a pas de mauvaise publicité. Et que ça crée un buzz qui a été doublé quelques jours plus tard quand l’annonce officielle est arrivée. Tout ce qui arrive est pour la bonne cause et c’est comme ça que je vois la vie depuis toujours. Certes c’est difficile de réaliser que le secret qu’on essayait de garder n’est plus un secret. En même temps je remercie Cyril Hanouna pour l’énorme exposition qu’il m’a donnée dans son programme et j’ai hâte de venir sur place.

Quelle est l’image que tu as de l’Eurovision, et est-ce que tu regardes le programme ?

Bien sûr j’adore l’Eurovision. C’est une émission qu’on regarde beaucoup. J’ai vécu une grande partie de ma vie en Israël et là-bas c’est quand même un phénomène de société. Israël, malgré sa petite taille a réussi à gagner quand même trois fois l’Eurovision. Il y a beaucoup d’affection pour ce programme. Et ayant vécu là-bas, je l’ai ressenti, je l’ai vécu. C’est une manifestation musicale qu’on adore regarder en famille tous les ans, en essayant de parier sur le gagnant, avec les frères et sœurs. Il y a vraiment tout un plaisir autour de ce spectacle. L’an dernier je voulais que la France ou Israël gagne et j’étais à fond, au taquet, pour les deux pays, surtout que mon batteur, de mes concerts, de mon groupe était aussi le batteur de Lisa Angell. Jamais je ne me suis imaginé, et encore moins l’année dernière, que nous serions, moi et ma chanson, un jour sur cette scène. Mais ça arrive et ça ne fait que confirmer qu’il faut croire en ses rêves.

C’est une tempête médiatique sans précédent. Comment t’es-tu préparé ?

Je ne me suis pas préparé. Je laisse les choses venir comme elles viennent. Je suis très bien entouré, très bien encadré. Les choses se font d’une manière ordonnée, structurée. Et Ludovic Hurel de France 2 est là et nous supervise et nous apporte sa gentille présence tout comme Edoardo Grassi bien sûr. Tout est clair. Tout est bien conçu. Il n’y a pas de difficultés. La seule chose est qu’on est plus exposé, mais c’est finalement le souhait de tous les artistes. Surtout quand on parle de musique et de sa chanson. Je ne demande rien de plus.

Souvent, en France, les médias en parlent de façon négative ou moqueuse. Tu t’es préparé à entendre des commentaires pas toujours très sympas.

Oui préparé à entendre et à répondre et à corriger les personnes qui ont une opinion avec laquelle je ne suis pas d’accord.

Quels sont les conseils que ton entourage te donne en ce moment ?

Beaucoup de questions tournent autour de la mise en scène, qui est pour le moment une surprise dont on n’a pas dévoilé les détails. La mise en scène est un facteur très important sur un show comme l’Eurovision et l’objet de toutes les personnes qui m’en parlent, qui me demandent si je vais vraiment mettre le feu et est-ce qu’on prévoit quelque chose qui sera à la hauteur de la chanson pour pouvoir se démarquer des autres pays. Oui, oui et oui. On va essayer en tout cas d’apporter à la France l’honneur qu’elle mérite depuis si longtemps.

Ta famille et tes amis te suivent ?

Bien sûr. Ma mère surtout et j’ai réussi à lui apporter tous les articles qui parlent de moi depuis le jour où j’ai commencé à passer dans les médias. Ça fait deux ans que je n’ai rien manqué et je vais chez le libraire tous les trois jours ! Et puis mes fans sur les réseaux sociaux sont très actifs et me font des captures d’écran dès qu’il y a quelque chose.

Quelle est la question que je ne t’ai pas posée et que tu aurais aimé que je te pose ?

C’est dur parce qu’on m’a posé tout un tas de questions aujourd’hui. Mais tu ne m’as pas demandé quel classement je vise.

Tu te prépares à gagner tout autant qu’à perdre ?

Je me prépare à toutes les éventualités mais en tout cas je ne veux pas avoir le regret d’avoir laissé quelque chose au hasard, de ne pas avoir pris au sérieux un des aspects préparatoires de ce concours. C’est pourquoi mon entourage et nous, nous essayons de veiller à ce que tout soit parfaitement bien géré pour que nous allions là-bas en étant sûrs qu’on a fait le meilleur pour avoir un bon score. Ensuite si la décision est extérieure à nous mais qu’on sait qu’on a fait le maximum possible, je le vivrai bien, même si c’est la dernière place. Ce n’est pas ce que je souhaite, mais même si c’est la dernière place et que nous n’avons pas de reproches à nous faire, ça ira. Et vu comme ça part maintenant, pour le moment nous n’avons pas, je pense, de reproches à nous faire. On fait vraiment le maximum pour que tout se passe bien.

Propos recueillis par Farouk Vallette le 7 mars 2016

Image à la une : Amir et Edoardo Grassi,©Farouk.Vallette